16 décembre 2019. Quelques jours après la flamboyante version de concert d’"Ariodante", de Haendel, dirigée par Marc Minkowskià la Halle aux Grains, la saison des Grands Interprètes accueille dans la même salle Raphaël Pichon (photo) et son ensemble Pygmalion, fidèles du lieu. Je suis très confiant sur la qualité de l’interprétation des œuvres annoncées ce soir: des airs de concerts et des opéras peu connus ou inachevés composés par Wolfgang Amadeus Mozart avant sa fameuse trilogie italienne – entamée en 1786, avec "les Noces de Figaro". Le chef a en effet déjà eu l’occasion de m’épater dans le répertoire mozartien, avec un programme dédié aux œuvres tardives et au Requiem du compositeur. Une fois installé, je suis surpris de voir l’attitude des interprètes déjà sont présents sur scène avant le début du concert: en pleine conversation ou prenant la pose pour un selfie, ils évoluent autour des instruments et sur un large espace rendu disponible par le placement de l’orchestre plus en arrière qu’à l’accoutumée. J’ai plutôt l’impression d’être au Théâtre Garonne, avant une représentation d’un spectacle du collectif flamand Tg Stan, par exemple. Et alors que l’orchestre fait entendre les premières notes du programme, je constate que le chef est encore assis à l’avant-scène, les pieds dans le vide, discutant avec un chanteur face aux spectateurs du premier rang. Cette distance inouïe prise avec le dispositif toujours trop figé du concert entend souligner la posture du Mozart de l’époque, inspiré par les Lumières et perméable au vent de liberté soufflant sur cette fin de XVIIIe siècle. Je lis que les pièces choisies ici appartiennent à une période qui voit éclore le génie du musicien, dont l’évolution stylistique aboutit à la conception d’un «“orchestre-personnage” désormais responsable et révélateur de la psychologie complexe des différents protagonistes, capable d’émouvoir au-delà des mots», assure le chef. Dans ses ébauches d’opéras et ses recherches du ton adapté ou de la vocalité propice, le compositeur est alors sans cesse en quête d’un livret à sa mesure, susceptible d'emmener le spectateur vers des terres encore inexplorées, où théâtre et psychologie des personnages seront sublimés par la musique. Pour servir ce programme, construit par Raphaël Pichon selon une dramaturgie soignement construite en trois tableaux scéniques, six merveilleux solistes se meuvent dans ce laboratoire musical mozartien: les sopranos Mari Eriksmoen et Siobhan Stagg, la mezzo-soprano Adèle Charvet, le ténor Linard Vrielink, le baryton John Chest, et la basse Nahuel Di Pierro. En plus de son rôle d’interprète, je note que ce dernier a élaboré une inventive et judicieuse mise en scène, avec quelques accessoires seulement, et assuré la direction d’acteurs avec une grande justesse. Je réalise que la théâtralité est ce soir omniprésente, bien plus que dans la production de "la Flûte enchantée" signée Nicolas Joel dans cette même salle… Je suis ici confronté à tous les éléments susceptibles de servir l’œuvre de Mozart dans l’esprit de son créateur, avec toujours une direction musicale impeccable et un orchestre majestueux, l'EnsemblePygmalion, qui ne m’a jamais déçu lors de ses multiples performances à la Halle aux Grains.
16 décembre 2019. Quelques jours après la flamboyante version de concert d’"Ariodante", de Haendel, dirigée par Marc Minkowskià la Halle aux Grains, la saison des Grands Interprètes accueille dans la même salle Raphaël Pichon (photo) et son ensemble Pygmalion, fidèles du lieu. Je suis très confiant sur la qualité de l’interprétation des œuvres annoncées ce soir: des airs de concerts et des opéras peu connus ou inachevés composés par Wolfgang Amadeus Mozart avant sa fameuse trilogie italienne – entamée en 1786, avec "les Noces de Figaro". Le chef a en effet déjà eu l’occasion de m’épater dans le répertoire mozartien, avec un programme dédié aux œuvres tardives et au Requiem du compositeur. Une fois installé, je suis surpris de voir l’attitude des interprètes déjà sont présents sur scène avant le début du concert: en pleine conversation ou prenant la pose pour un selfie, ils évoluent autour des instruments et sur un large espace rendu disponible par le placement de l’orchestre plus en arrière qu’à l’accoutumée. J’ai plutôt l’impression d’être au Théâtre Garonne, avant une représentation d’un spectacle du collectif flamand Tg Stan, par exemple. Et alors que l’orchestre fait entendre les premières notes du programme, je constate que le chef est encore assis à l’avant-scène, les pieds dans le vide, discutant avec un chanteur face aux spectateurs du premier rang. Cette distance inouïe prise avec le dispositif toujours trop figé du concert entend souligner la posture du Mozart de l’époque, inspiré par les Lumières et perméable au vent de liberté soufflant sur cette fin de XVIIIe siècle. Je lis que les pièces choisies ici appartiennent à une période qui voit éclore le génie du musicien, dont l’évolution stylistique aboutit à la conception d’un «“orchestre-personnage” désormais responsable et révélateur de la psychologie complexe des différents protagonistes, capable d’émouvoir au-delà des mots», assure le chef. Dans ses ébauches d’opéras et ses recherches du ton adapté ou de la vocalité propice, le compositeur est alors sans cesse en quête d’un livret à sa mesure, susceptible d'emmener le spectateur vers des terres encore inexplorées, où théâtre et psychologie des personnages seront sublimés par la musique. Pour servir ce programme, construit par Raphaël Pichon selon une dramaturgie soignement construite en trois tableaux scéniques, six merveilleux solistes se meuvent dans ce laboratoire musical mozartien: les sopranos Mari Eriksmoen et Siobhan Stagg, la mezzo-soprano Adèle Charvet, le ténor Linard Vrielink, le baryton John Chest, et la basse Nahuel Di Pierro. En plus de son rôle d’interprète, je note que ce dernier a élaboré une inventive et judicieuse mise en scène, avec quelques accessoires seulement, et assuré la direction d’acteurs avec une grande justesse. Je réalise que la théâtralité est ce soir omniprésente, bien plus que dans la production de "la Flûte enchantée" signée Nicolas Joel dans cette même salle… Je suis ici confronté à tous les éléments susceptibles de servir l’œuvre de Mozart dans l’esprit de son créateur, avec toujours une direction musicale impeccable et un orchestre majestueux, l'EnsemblePygmalion, qui ne m’a jamais déçu lors de ses multiples performances à la Halle aux Grains.